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Chronique 18 : Entre la Tête et le Coeur
Samedi 6 Avril – Vendredi 12 avril
Le samedi, nous n’allons pas à
l’hôpital. Mamie donne encore généreusement de son temps. Ça nous permet de
respirer un peu et de passer un peu de temps en famille.
Le dimanche, je vais pour la
première fois seul à l’hôpital pendant que maman fait les magasins avec
Anabelle. Nicolas a passé une bonne nuit. Il est toujours stable. La journée se
passe bien, c’est un peu long tout seul, je comprends encore plus maman qui
doit le faire plusieurs fois par semaine.
Je tente de donner le biberon à
Nicolas. Maman et mamie ont bien réussi à lui faire prendre une bonne quantité.
Moi, ça ne marche pas. Même s’il est réveillé, même en le stimulant, je
n’arrive pas à lui faire prendre plus de 3 ml. Je retente le coup au biberon de
15 heures, 2 ml. Malgré que je sois conscient de son handicap, de sa difficulté
à boire, à coordonner succion et sa déglutition, j’enrage. J’ai envie de le
secouer, de lui crier de boire plus. Je renonce et je le remets dans son lit.
Je quitte l’hôpital. J’ai encore cette rage au fond de moi dont j’ignore la
source et je me dis que pour son bien, je ne dois pas avoir à m’en occuper. Il
n’a surtout pas besoin d’un père qui pour une raison inconnue s’embrase à la
moindre niaiserie.
Le mardi, nous rencontrons encore
une fois l’équipe médicale qui nous confirme que Nicolas est stable et qu’il
est très probable qu’il puisse sortir des soins intensifs dans très peu de
temps. Nous changeons alors de champs de bataille. Avant, c’était la vie contre
la mort. Maintenant, c’est une bataille entre la tête et le cœur. Le cœur qui
dit que c’est notre enfant, c’est notre rôle de le protéger et d’en prendre
soin. La tête qui dit que nous ne serons pas capables de nous en occuper, que
son cas sera trop lourd pour notre famille et qu’il serait mieux dans une
autre. Toute les avenues sont douloureuses, remplies de tristesse et de culpabilité.
Et il faut surtout faire attention de
choisir la moins pire des options(pour nous, il n’y en a pas de bonne), mais
surtout de le faire en commun accord au sein du couple, car cette décision
pourrait bien être la pire de notre vie si on la regrette ou si on en veut à
l’autre.
J’ai déjà l’impression que maman et
moi nous ne suivons pas nécessairement le même chemin. Son cheminement semble se faire plus
rapidement. Elle accepte plus que moi l’idée de l’adoption, que notre fils soit
confié à une famille qui l’acceptera et l’aimera pour ce qu’il est. De mon
côté, je suis plus hésitant à couper le cordon au complet, même si ma tête me
dit que c’est fort probablement la meilleure solution.
Nicolas passe un autre test
auditif. Cette fois-ci, le test s’avère positif pour les deux oreilles. Il
semble maintenant bien entendre. C’est une bonne nouvelle. Maman réussit à lui
donner plus de lait avec le biberon, il fait de bon progrès.
Jeudi maman apprend que Nicolas
sera transféré à l’hôpital Pierre-Boucher, lieu de sa naissance. Toute l’équipe
vient lui présenter leur au revoir. C’est bizarre, mais nous ressentons une
certaine tristesse de devoir quitter cet environnement et toute cette équipe
qui nous a pris sous leur aile. Ils nous ont écoutés et suivis dans notre
cheminement durant les 6 dernières semaines.
Par la même occasion, maman reçoit
les résultats du dernier EEG de Nicolas. Il est normal. Maman est surprise et
tente de demander s’il est normal sans convulsion ou normal comme un enfant
sans handicap mental. La résidente dit que c’est ce qu’indique le rapport du
neurologue, mais n’en sait pas plus. L’infirmière de soutien aux familles qui
est auprès de maman lui confirme que non, Nicolas n’est pas normal et ne le
sera jamais et qu’il ne faut pas se faire d’espoir. Elle lui dit que les signes sont bien présents depuis
le début. Même après tout ce qu’on a
vécu, tout ce que nous avons traversé, nous gardons toujours au plus profond de
nous cet espoir fou qu’il pourrait finalement être normal. Mais Nicolas est
Nicolas, ni plus, ni moins.
Le vendredi, notre fils est
transféré aux soins intermédiaires à l’hôpital Pierre Boucher. Les images en
flashback de la naissance, du constat par le médecin de ses nombreuses anomalies
physiques et de l’effondrement de nos rêves resurgissent lorsque nous entrons
dans l’hôpital. 46 jours après sa naissance, il retourne là où tout a commencé
et là où se déroulera vraisemblablement le dernier acte de cette tragédie.
04.16-19:00Bonsoir, une petite pensée pour vous; sans jugement.Une pensée qui se voudrait un encouragement vers votre décision. La réflexion qui me poursuit: fais-je qq chose par amour pour mon enfant, lorsque je la punis, est-ce par amour, pour son bien? Ai-je fait ce que je peux, lui ai-je apporté ce dont elle a besoin, dans la limite de ma capacité. Difficile de reconnaître notre capacité, sans avoir vécu, sans avoir chaussé les bottes, sans avoir entamé le chemin en question; en tant que parent, tout est acte d'amour, de tuteur, de persévérance, pour leur bien. Au delà de ce questionnement, avoir l'humilité, la capacité de s'avouer une peur si grande qu'elle paralyse, qu'elle enlève ou diminue notre capacité de jugement.DOuter est bien normal, onest sûrs de soi dans tellement de sphères de notre vie; le désarroi est grand en situation inconnue. Ayez confiance en vous, en votre capacité de bien faire les choses, à prendre les bonnes décisions, par amour, selon l'amour porté par les deux parents, pour aujourd'hui et les semaines à venir...Courage à vous deux! Je pense à vous.M
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